• Leur ficher mon billet

    Ce matin, tandis que mes paupières ensommeillées s'ouvraient avec la vitesse d'un ministre de l'Economie chargé de réfléchir à l'augmentation du SMIC et que je mouvais ma carcasse avec la dextérité de feu Pierpoljak après un concert de reggae fêté comme il se doit, le chant des oiseaux, célébrant le soleil qui dardait ses rayons d'argent à travers les écharpes de brume, comme le disaient si bien Les Inconnus, pénétra dans ma chambre.

     

    Tout ce que j'avais à faire pour présenter dignement à sa nounou ma fille et à mes collègues mon corps, putréfié par la chaleur moite du mois de juillet et par des rêves inavouables dans lesquels Najat Vallaud-Belkacem jonglait avec des déchets nucléaires de Fukushima, eut rapidement raison de ma fragile volonté de prendre le train à une heure décente pour qui prétend encore duper son entourage sur son attrait pour le labeur matutinal. J'arrivai donc à la gare avec une bonne heure de retard sur mes projections liminaires, heureux toutefois de la perspective réjouissante de partager mon insignifiance et mon indifférence passionnée avec mes futurs co-condamnés aux transports en commun franciliens.

     

    J'en étais à peu près là de mes réflexions lorsque je me rendis compte que dans la précipitation, j'étais parti sans mon sac, ce fidèle compagnon de mon ennui quotidien, ce valeureux témoin de mon insondable médiocrité. Comme j'habite à un quart d'heure de la gare, je pris le train environ cinquante minutes plus tard, avec la ferme intention de travailler efficacement pour terminer cette chronique que j'étais censé enregistrer à 14 heures et qui allait, je n'en doutais pas, changer le quotidien de dizaines d'internautes piégés par leur algorithme.

     

    Mais c'était compter sans la volonté farouche d'un francilien de partager avec toute la rame son goût pour les chants de supporters avec toute la force que peut donner l'ingurgitation de quelques litres de 8.6. Il me restait encore un peu de temps avant de m'avouer vaincu et je projetais de redoubler d'idées et de concepts « inspirants » dès mon arrivée sur mon lieu de travail. J'appris très vite que l'on n'avait pas lu l'article que j'avais envoyé hier et qu'on ne comptait pas le lire tout de suite. Quant à celui que j'avais envoyé la semaine dernière, mieux valait l'oublier. L'espace d'un instant, je compris enfin le vide abyssal et le sentiment plénier d'inutilité que pouvait ressentir le rédacteur d'un discours de Benjamin Griveaux.

     

     

    Je décidai donc d'écrire ce billet, tout aussi inutile que les précédents, mais que, validé par moi-même et publié sur mon blog, personne ne pourrait me refuser.

    « Ne plus voir les expos en peintureRêve d'un jour »
    Google Bookmarks Blogmarks

  • Commentaires

    Aucun commentaire pour le moment

    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :