• Ne plus voir les expos en peinture

     

    Qu'y a-t-il de plus agréable, au cours d'une exposition, que d'entendre les commentaires de ses contemporains au moment même où l'on se laisse absorber par un tableau et où l'on ne rêve que de contemplation ?

     

    Quoi de plus vivifiant pour le cerveau que d'écouter des aveugles parler de Miró ou des cassos partir à l'assaut du coup de pinceau de Picasso ? Quoi de plus voluptueux que d'être tiré de sa rêverie par ceux qui veulent à tout prix évoquer leur dernier resto devant Le Déjeuner sur l'herbe ou leur dernière fellation devant la pipe de La Trahison des images, sans même parler de tous ceux qui confondent branlette intellectuelle et astiquage de pinceau ?

     

    Certains qu'on peut discuter des goûts comme on discute des couleurs, ils se sentent obligés de dire sans cesse et sans argument s'ils aiment ou s'ils n'aiment pas. Se prenant pour des spécialistes, d'autres ajoutent à Delacroix la bannière en ne pouvant s'empêcher de faire leur coq devant un Poussin, incapables qu'ils sont de se Courbet devant la puissance de l'art, eux dont la seule devise est « Veni, Vidi, Vinci ».

     

    Croyant, grâce à la large palette de leurs réflexions, révéler un artiste alors qu'ils n'en esquissent même pas le brouillon du portrait, ils tirent un trait sur l'art sans se rendre compte du Degas qu'ils font. Il faut être un peu Léger pour penser que l'on peut apporter quoi que ce soit aux chefs d'œuvre et qu'ils pourraient par leurs commentaires rendre à ces arts ce qui appartient à Cézanne.

     

    Je suis en pareil cas souvent contraint de réprimer un Cri, et il s'en faut de peu que je les Munch sur place. Je deviendrais fresque violent. Je dois réfréner d'irrépressibles envies de leur rendre le Monnet de leur pièce et je rêve que je les Braque avant de leur tirer deux balles dans le Buffet.

      

    Heureusement, comme je déteste avoir le mauvais Warhol, je finis par calmer mon Corot. Et je Magritte avec force aux impressions que ces immenses artistes m'auront laissées pour ne jamais jeter le bébé avec l'eau d'Rubens.

     

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  • Commentaires

    2
    Helene
    Mardi 14 Juin 2022 à 18:33
    Je viens de lire votre critique du roman de clémentine Autain. Oh la vache ! Qu'est ce que vous lui avez mis. J'étais pliée de rire du début jusqu'à la fin. Je vous remercie grandement de traquer et moquer ainsi la bêtise ! Mon Dieu oui! Quelle bêtise !
      • Mardi 14 Juin 2022 à 22:18

        Merci beaucoup. Je vais essayer d'alimenter de nouveau ce blog prochainement.

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