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    Dans un article intitulé « Peut-on être féministe et apprendre la vie à son mec ? », Slate part à la recherche de l'équilibre entre féminisme et vie de famille. Et l'on découvre que ce n'est pas facile tous les jours pour ces femmes qui confient être « cheffe(s) de projet pour la charge mentale ». Elles ont en tout cas bien du mérite de croire qu'on peut encore éduquer ces hommes qui ne comprennent rien à rien. « En tant qu'instit, j'estime que j'ai un devoir d'éducation et que, s'il y a un dysfonctionnement, c'est qu'il y a peut-être des choses qui sont encore opaques et qui doivent être explicitées », explique l'une d'elles. On ne peut qu'admirer sa patience.

     

    Pour arriver à leurs fins, elles rivalisent d'astuces : « Je voulais que ce soit lui qui élabore la liste de la charge mentale, penser à acheter des éponges ou des trucs comme ça, parce que c'était important pour moi qu'il fasse ce cheminement et qu'il s'en souviendrait mieux si c'était lui qui avait énoncé tout ça » confie une autre. Tout ça n'est pas sans rappeler les meilleures séquences de nos pédagogues de l'EN où on invite l'élève à « construire lui-même son savoir ». Avec la réussite que l'on sait.

     

    Mais les déceptions sont nombreuses car les hommes sont, comme chacun sait, longs à la détente.

    « Il va me dire que, oui, il comptait bien préparer à manger ce soir sans que je lui dise, mais il va commencer trop tard, ce qui va nous faire manger trop tard », regrette l'une, tandis que l'autre déplore qu' « il commence par exemple à couper les concombres avant de faire chauffer l'eau des pâtes ». Sans compter les fêtes d'anniversaires « désurprisée(s) », pour employer les magnifiques néologismes féministes. Heureusement, on entrevoit parfois un mieux : « l'apprentissage n'est pas suffisamment ancré pour être réinvesti et transposé de manière autonome mais il y a eu des progrès » se réjouit l'institutrice. Quel dommage que ces femmes n'aient pas encore eu l'idée de compiler ces belles appréciations dans un bulletin trimestriel, nul doute que cela encouragerait beaucoup leur conjoint à « continuer dans cette voie ».

     

    Face à l'incompétence notoire de leur homme qui s'obstine à avoir des habitudes différentes voire une autre vision de la vie que la leur, certaines se battent encore « Croyant dans l'éducabilité, je me dis que ça s'améliorera,(...) Ça ne sera peut-être pas parfait mais il faut continuer à y croire quand même, donc je continuerai à travailler là-dessus ». Mais d'autres s'épuisent face à l'ampleur de la tâche « Notre aîné a 5 ans, on a une affiche pour lui avec les règles de la maison. Je fais la même chose que pour un gamin de 5 ans. C'est complètement fou! ». N'est pas Super Nanny qui veut.

     

    Certaines vont jusqu'à renoncer, comme cette éducatrice Montessori qui voulait « un adulte fonctionnel » et qui a donc « préféré être seule plutôt que de devoir prendre en charge l'éducation d'un adulte ». Quelle idée aussi de mettre sur le marché des hommes défectueux et sans garantie ? Le patriarcat est décidément partout.

     

    Une coordinatrice RH de 33 ans ne cache pas à quel point ce manque de fonctionnalité de l'homme érode l'amour : « Je ne peux pas aimer quelqu'un que je ne considère pas comme un égal et à qui je considère qu'il faut que j'enseigne des choses sur des aspects comme le ménage ». « J'avais un froid dans mon cœur, parce qu'il ne (...) faisait pas (ce qu'il faut) » explique une autre. Comment ne pas les approuver ? A se demander si l'amour existe vraiment : « Si on veut vraiment être féministe, on ne peut pas être en couple avec un homme » avance l'une des femmes interrogées. Bref, le véritable amour n'est pas introuvable, à condition de chercher du bon côté.

     

    Pour prendre un peu de hauteur, Slate interroge alors Chiara Piazzesi, une « chercheuse montréalaise en sociologie de l'intimité amoureuse et des émotions », professeur à l'Université du Québec à Montréal (Uqam) et membre du Réseau québécois en études féministes (RéQEF ). Voilà qui impose le respect ! Que dit cette dame ? Qu'« on ne peut pas avoir des solutions noires ou blanches» à ce « clash conjugal des socialisations » (dixit Slate). La profondeur de l'analyse laisse sans voix. Dommage toutefois qu'elle n'ait pas ajouté "Dans la vie, il y a des hauts et des bas", on en aurait appris encore davantage.

     

    Toutes ces terribles épreuves endurées par ces femmes héroïques font déjà froid dans le dos. Mais ce n'est pourtant rien à côté de l'obligation de se « réfrène(r) vachement » pour ne pas « dicter à son conjoint la «bonne» manière de faire ». «  C'est compliqué de ne pas se transformer en la maman de son conjoint » confirme une autre femme.

     

    Ce retour d'un chef de famille fait chaud au cœur !

     

     

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