• Littérature : le cinéma se met à la page

    Cette semaine, lors du festival de Cannes, aura lieu un événement un peu plus intimiste que les autres : une rencontre entre éditeurs et producteurs. Les premiers auront cinq minutes pour convaincre les seconds d'adapter telle ou telle œuvre de leur catalogue. Autant dire qu'il faudra être bon dès la première prise.

    Il faut avoir un sacré jeu d'acteur pour convaincre les écrivains de céder leurs droits. Mais il faut également savoir choisir ses mots pour que les producteurs acceptent d'adapter un roman.

    Si le cinéma a toujours puisé dans la littérature une source d'inspiration, il semble que le phénomène se soit accentué ces dernières années. Selon L'Express, qui a consacré un dossier à la question en Mars dernier, « Un film sur cinq est une adaptation, un taux stable depuis six printemps. Mieux, près d'un sur trois est issu d'une œuvre française, au terme d'une belle progression (de 23% en 2006 à 32% en 2012) »

    Faut-il pour autant se réjouir qu'un faisceau d'auteurs soit sous les projecteurs? Est-ce que miser sur un livre garantit le succès cinématographique, autrement dit est-ce que l'adapter c'est le faire adopter ? Comment filmer la littérature sans lui faire écran ? Autant de questions sur lesquelles s'est penchée notre rédaction.

    Se sucrer à Cannes ?

    Anna Gavalda, François Bégaudeau, Olivier Adam, David Foenkinos, Amanda Sthers, Guillaume Musso : on ne compte plus les génies dont les chefs-d’œuvre ont été adaptés au cinéma. Que le septième art ait trouvé les dignes successeurs de Zola, Maupassant ou Flaubert n'a rien d'étonnant. La nouveauté tient plutôt dans le fait que toutes les maisons d'édition se dotent désormais de « services ad hoc » explique le journaliste de L'Express.

    Encore une exception commerciale, pardon culturelle française, comme le confirme Laure Saget, directrice de l'audiovisuel chez Flammarion, présente au dernier Festival international du film de Berlin : « Nous étions, nous les Français, les seuls éditeurs, tous les auteurs étrangers étant défendus par leurs agents littéraires »

    Voilà en effet une excellent nouvelle pour tous ceux qui souhaitent que la plupart des écrivains continuent, en France, à ne pas pouvoir vivre de leur travail. Et si les éditeurs n'ont pas été embêtés par les méchants agents à Berlin, ce serait un comble qu'on leur cherche à Cannes des noises.

    Mais si l'auteur, on l'a bien compris, risque de tout donner à Skippy, il en sera quitte pour une superbe consolation, explique l'enquête, car il aura l'immense honneur de voir « son livre réédité lors de la sortie du film, habillé d'un bandeau ou d'une illustration de long-métrage ». Quelle consécration ! Pourrait-on rêver, en tant qu'auteur, plus belle fin que celle de voir son roman, comme les produits de supermarché autrefois, habillé d'une étiquette « vu à la télé » ?

    Il ne manquerait plus alors qu'un label « garanti produit littéraire » pour que la fête soit totale et surtout une photo de l'auteur en première page car rien n'est plus incitatif à la rêverie, rien ne symbolise mieux la littérature que la tête de Christine Angot ou d'Amélie Nothomb en première de couv'.

    Mais quelle est la différence entre un bon et un mauvais roman ?

    L'Express nous donne quelques précieux indices : tout d'abord « Une histoire forte » preuve qu'un bon roman, c'est avant tout un bon scénario. Les critiques littéraires l'ont bien compris, eux qui très souvent, savent se contenter de raconter l'histoire pour appâter le lecteur, se gardant bien de citations inutiles ou d'analyses littéraires pédantes et superflues.

    Deuxième condition nécessaire à l'adpatation : « de beaux personnages », l'important n'étant pas, on l'a bien compris, qu'ils aient une quelconque épaisseur psychologique mais qu'ils passent bien à l'écran.

    Enfin, « le fait que le livre ait déjà fédéré un public est à même de rassurer producteurs, réalisateurs et diffuseurs » souligne Delphine de la Panetterie, de Robert Laffont. Tiens donc, qui l'eût cru ?

    Les adaptations récentes de L'écume des jours ou de L'homme qui rit ont prouvé, à ceux qui en doutaient, qu'adapter une véritable œuvre littéraire au cinéma n'est pas si simple qu'on pourrait le penser. Faut-il alors se réjouir de l'augmentation des adaptations au cinéma ? Oui car le gros avantage d'une œuvre sans aucune portée littéraire, c'est qu'on ne risque pas de la trahir. C'est sans doute pour cela que les producteurs adaptent de plus en plus de romans français, lesquels ne sont que de simples scénarios dépourvus de toute valeur littéraire.

    Jean Giono n'avait décidément rien compris, lui qui a voulu collaborer jusqu'au bout au tournage de son chef-d'oeuvre Un roi sans divertissement. Résultat : une sortie plus que discrète en salle et un passage éclair sur Arte. Un vrai gâchis. S'il avait connu Fabien Onteniente, il serait peut-être entré dans l'histoire du Box-Office. A quoi tient une vie...

     

     

     

     

     

     

     

     

     

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  • Commentaires

    1
    Stelle Gazie
    Lundi 19 Mai 2014 à 10:15

    bien écrit !! cet article mériterait son adaptation...

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