• On entend beaucoup de choses sur l'école et beaucoup de non initiés aimeraient savoir si le niveau baisse réellement comme on l'entend souvent ou si l'école fait ce qu'il faut pour combattre l'échec scolaire.

    C'est que ces gens-là, dont la médisance est le fond de commerce, n'ont, je crois, jamais eu la chance d'assister à une réunion estampillée « éducation nationale ». Autrement, nul doute qu'ils auraient été bouleversés par l'ingéniosité du système, par son incroyable cohérence et par sa créativité sans cesse renouvelée.

    J'ai eu, personnellement, l'immense privilège de participer cette semaine à une réunion sur la liaison entre collège et lycée et je dois bien avouer que je ne m'en suis pas encore tout à fait remis tant ma vision de l'école, et même du monde, je n'ai pas peur de le dire, a changé depuis.

    Quelle chance de bénéficier du travail de tous ces pédagogues pour enfin faire notre métier correctement, quel bonheur de participer à l'intelligence collective et de ne jamais avoir l'impression de perdre son temps. Mais quelle frustration aussi de ne pouvoir participer qu'à un seul groupe de travail tant les deux axes étaient complémentaires et avaient été mûrement réfléchis, sans aucun risque qu'ils se recoupent jamais. (I/ comment accompagner les élèves dans la liaison collège/lycée II/ Les élèves en difficulté)

    Les réunions de l'éduc'nat' : un cas d'école

    Après une courte présentation d'une heure du lycée qui nous aura appris une foule de choses insoupçonnées comme le fait qu'il y a une vraie différence entre le collège et le lycée, que les élèves qui ne travaillent pas suffisamment sont souvent en difficulté ou encore qu'il y a davantage de garçons qui choisissent la filière S, il est alors temps de lancer le débat proprement dit. Et la question du jour n'est pas moins pertinente que celles qu'on nous posait jadis à l'IUFM :comment faire en sorte que tous ces élèves qui sont arrivés au lycée sans jamais acquérir une seule compétence les acquièrent toutes sans exception en un an ?

    Après avoir lancé quelques pistes de réflexion comme « la convivialité du Web classeur », l'importance pour l'élève de construire « l'image de soi », la nécessité d'une plus grande transversalité de l'enseignement ou l'utilité incontestable du sacro-saint livret de compétences, le tout en prenant garde de ne jamais sombrer dans le verbiage et le jargon IUFM, les chefs d'établissement nous invitent à réfléchir à une question essentielle : « Est-ce que l'élève a du sens dans l'école ? »

    L'égalité déchéance

    Il y a quelques années de cela, lorsque l'école était réservée à une élite et que les professeurs oppressaient les élèves avec des méthodes d'un autre âge, il arrivait souvent qu'on pose la question à l'envers : « Est-ce que l'école a du sens pour l'élève ? »

    Fort heureusement, cette période, notamment grâce à la quasi-interdiction du redoublement, la création du collège unique, la baisse des exigences dans la notation des examens, la fuite des classes moyennes vers le privé, la fin de l'autoritarisme des enseignants, l'intrusion des parents dans l'école ou encore l'instauration de quotas de réussite au BAC, est définitivement révolue.

    On peut donc enfin faire de la vraie pédagogie et amener tous les élèves jusqu'à l'université qui se chargera de donner les bases d'orthographe et de grammaire à tous les élèves qui ne les ont jamais acquises. En attendant, il suffira d'établir des fiches « passerelles » (on devrait dire « viaduc ») entre la troisième et la seconde pour faire croire qu'en listant les difficultés des élèves, elles s'autodétruiront, de multiplier les heures de soutien pour que le cours ne soit plus le lieu de l'apprentissage et surtout de réfléchir sur les axes de médiation à mettre en œuvre.

    « Les hommes intelligents aiment apprendre, les imbéciles aiment enseigner » disait Tchekhov. Grâce aux nombreux efforts de l'éducation nationale, la limite entre les uns et les autres est en passe de disparaître. C'est un pas de plus vers l'égalité.

     

    Lorsque je te regarde ô ma chère éduc'nat

    Il semble que le ciel, jaloux de tes yeux chastes

    Tente avec le soleil d'égaler le contraste

    Formé par tes prunelles et tes joues écarlates

     

    Tes lèvres semblent dire: "ô mon cher Apollon

    Pour toi, j'effacerai mes imperfections

    En guise de serment je te donne un Numen

    Présage de mon cœur, accès à mon hymen"

     

    Mais tes courbes souvent me donnent le tournis

    Ta bouche tour à tour égratigne ou cajole

    Ton bras est un flambeau qui éclaire ou immole

    Ton cœur un labyrinthe où manque la sortie

     

    Complainte de l'enseignant

     

     

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  • En ce début d'année 2014, Flammarion a décidé de laisser de côté l'insipidité des auteurs contemporains habituels pour se tourner vers de nouveaux talents. C'est tout à son honneur et c'est d'autant plus courageux que les trois nouveaux auteurs à qui Flammarion a confié les clés de cette nouvelle année sont de parfaits inconnus : Cécilia Attias ex-Sarkozy, Elie Semoun et La Fouine. Pour couronner le tout, ces trois futurs auteurs majeurs du 21ème siècle ont choisi une voie littéraire audacieuse, tournant délibérément le dos à la facilité : le genre autobiographique. Enquête.

    La Fouine, Semoun, Sarko : et tout le reste est littérature

    « La Fouine est un phénomène. Sa vie vaut tous les romans ». Elie Semoun s'interroge :  « est-ce que ma vie est suffisamment intéressante pour en faire un livre » ?

    On cerne un peu mieux, à travers ces deux remarques tirées des quatrièmes de couverture, la définition de la littérature pour Flammarion. La littérature ne vise pas à se saisir du réel pour le transformer par l'acte littéraire, elle ne doit pas non plus tendre à l'universalité. Elle ne doit pas consister en un travail constant de la forme, tel que le préconisait Malherbe ou encore Blanchot qui expliquait que littérature devait pouvoir se lire « lis tes ratures ». Elle doit se contenter de raconter la réalité brute, débarrassée de tout ornement littéraire superflu, et c'est le détail de cette réalité qui fait tout son intérêt, qui surpasse même toute littérature.

    Qui pourrait le nier ? Une couverture de Closer ne vaut-elle pas tous les romans de Flaubert ? Le plaisir d'une photo du président, casque non attaché sur la tête, assis derrière une actrice supposée être sa maîtresse, ne vaut-il pas tous les échanges de lettres des personnages des Liaisons dangereuses ?

    Tourner la page de la littérature-business

    Cécilia Sarkozy (Attias) indique dans la quatrième de couverture qu'elle est une femme qui n'aime pas beaucoup parler d'elle. C'est pourquoi elle profite de son anonymat total depuis sa rupture avec l'ancien président et son déménagement à New-York pour revenir sous les feux de l'actualité avec cette autobiographie. Tout cela est d'une logique implacable. Et Flammarion, toujours avide de traquer la littérature partout où elle se trouve, même lorsque celle-ci n'est pas forcément vendeuse, n'a pas raté cette occasion de donner la parole à ce génie littéraire du 21ème siècle. C'est beau de se dire qu'un éditeur comme Flammarion, malgré la paresse intellectuelle et la loi du business qui règnent aujourd'hui dans le monde « littéraire » continue, contre vents et marées, de rechercher les Rimbaud et les Lautréamont de demain. C'est beau également de se dire que grâce à Flammarion, nous avons évité la lecture du dernier Angot ou du dernier Nothomb et que nous avons découvert celle de La Fouine.

    Goldman disait, dans un mail envoyé au JDD, peu après avoir appris qu'il avait été désigné « personnalité préférée des Français » :« Je ne souhaite toujours pas participer à cette bizarrerie de l'époque qui consiste à dire très fort et partout qu'on n'a rien de spécial à dire ». Voilà quelqu'un qui n'a décidément rien compris à la littérature.

     

     

     

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  • « 10 9 8 7 6 5 4 3 2 1 0 » etc...outre que ce décompte me rappelle chaque année le tube de Benny B et par là même les heures les plus sombres de notre histoire ; outre que je me suis toujours demandé à quoi cela pouvait bien servir de faire un décompte avant la nouvelle année, j'ai toujours éprouvé le plus profond mépris pour tous les gens qui fêtaient chaque année le réveillon de la Saint-Sylvestre et par conséquent pour moi-même.

    Or, depuis que plus un chat ne s'appelle Sylvestre et qu'il est donc devenu matériellement impossible de le fêter, il est de coutume de célébrer la nouvelle année. Doit-on se réjouir de ces réjouissances ?

    Savoir faire du tri-cycles

    Est-on bien sûr que le début d'une année marque le début d'un cycle et la fin d'un autre ? Nouvel an rime-t-il forcément avec nouvel élan ? Au nom de quoi peut-on être si sûr que les années se suivent et ne se ressemblent pas ? Pourquoi se réjouir de l'apparition d'une nouvelle année si c'est pour célébrer sa fin 365 jours plus tard ? Qu'y a-t-il de si joyeux à commencer une nouvelle année qui nous rapproche un peu plus de la retraite qu'on risque fort de ne jamais toucher ? Ceux qui crient ainsi chaque année « Le roi est mort, vive le roi! » oublient sans doute que le président Hollande est toujours en vie et qu'il n'y a donc pas de quoi en faire un fromage.

    Et puis n'est-ce pas un peu choquant de quitter une année sans en avoir fait le deuil ?

    Les vœux pieux de Saint Pépère

    La deuxième chose qui m'a toujours semblé suspecte dans cette célébration de la nouvelle année, c'est la tradition des vœux que l'on balance à tout-va comme une formule magique censée chasser les mauvais esprits. Quelle différence avec la superstition si ce n'est que la nuit de la Saint-Sylvestre, tous les chats sont gris ?

    Quelle valeur peuvent avoir des vœux de bonne année quand même François Hollande nous présente les siens avec une confiance et une détermination qui n'est pas sans rappeler celle de Jacques Cheminade à la veille des élections présidentielles ? Le seul vœu qui aurait pu se réaliser, c'est le fameux « bonne santé » puisque ça ne dépendait pas de lui. Hélas, il n'y a pas pensé mais nul doute que certains de nos futurs ex-amis s'en chargeront à sa place.

    Un président pas à la fête

    L'autre raison pour laquelle je ne crois pas aux vœux, c'est qu'il y a des vœux contradictoires. On ne peut pas à la fois souhaiter des bons vœux au président et souhaiter dans le même temps à la France de sortir de la crise en 2014 sans risquer la schizophrénie. Difficile également de souhaiter parallèlement la croissance économique et la diminution des gaz à effet de serre ou la victoire du P.S.G en champion's league et l'éradication d'Al Qaïda

    Non, décidément, si Hollande avait vraiment voulu réaliser nos vœux, il aurait commencé par ne pas intervenir à la télévision le soir du réveillon. Doit-on rappeler que le nouvel an se célèbre traditionnellement entre amis ? Les seuls vœux qu'on aurait aimé lui voir prononcer ce sont des vœux monastiques afin qu'il se retire à jamais de la vie politique française, en emportant avec lui, si possible, son ex-compagne. Après un an et demi de présidence, on peut affirmer sans se tromper qu'ils étaient définitivement faits l'un pour l'autre.

    La seule certitude pour 2014, c'est qu'on aura peut-être enfin de vraies raisons de souhaiter l'arrivée de 2015.

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